BACON

Méthode de travail

Bacon débutait généralement un tableau en esquissant grossièrement la composition directement sur la toile, en fines couches de peinture à l’huile. Le travail préparatoire de la conception des images prenait souvent la forme de brèves notes écrites à la main et de manipulation de photographies.

Depuis l’invention de la photographie, de nombreux artistes, de Degas à Warhol en passant par Picasso, ont exploité des « reproductions mécaniques ». Bacon transformait des images photographiques souvent banales en peintures d’une puissance exceptionnelle. Il était extrêmement secret sur ses pratiques opératoires non conventionnelles ; même ses intimes étaient rarement autorisés à explorer les milliers de livres et de revues précairement entassés sur les étagères de son atelier ou la multitude d’images éparpillées sur le sol. Le dialogue entre les nus de Bacon et les études cinétiques de Muybridge a été identifié dès 1950, tout comme son admiration pour Vélasquez, Michel-Ange et Rembrandt, mais c’est seulement après la mort du peintre qu’il est devenu possible de commencer à cerner le vaste champ de ses stimulants visuels.

Peu d’archives antérieures à 1961 subsistaient encore à la mort de Bacon. Au fil des trente et un ans passés dans l’atelier de Reece Mews, Bacon a régulièrement effectué de grands nettoyages, lorsque l’accumulation de détritus sur le sol de l’atelier devenait – même à ses yeux – vraiment excessive. Il détruisit ainsi en 1981 vingt-quatre sacs de ces documents, y compris – au grand dam de Valerie Beston de la Marlborough Gallery – tous ses exemplaires du magazine Picture Post. On commence à mieux comprendre aujourd’hui la synthèse complexe de ses sources iconographiques ; pour autant, même si les images découvertes dans la presse éveillaient en lui de puissantes résonances, le processus de création ne doit pas être confondu avec le résultat final, qui dépendait de sa capacité à produire une peinture fluide et spontanée. Comme Bacon le déclarait à Sonia Orwell en 1954 : « Je veux peindre, pas courir après les coupures de presse. » Afin de « capturer la réalité vivante », il recherchait la qualité spectrale du corps humain en action, métamorphosant des images plates en évocations vibrantes de ses sujets vivant et respirant dans leur éphémère fragilité.